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12ème Chronique

LGV : Ségolène Royal résiste au désengagement de l'État

Kritix, le Friday 30 October 2009 - 6568 consultations - Commenter la chronique

De par sa lettre ouverte du 20 octobre 2009 [pdf], la présidente de région Poitou-Charentes entre dans une résistance frontale au sarkozysme ! « Je demande la démonstration de la pertinence de ce projet en matière d'économie et d'aménagement du territoire, après une comparaison avec des projets alternatifs »
       Le gouvernement Fillon veut imposer aux collectivités locales des dettes illégitimes, une absence de solidarité nationale dans l'aménagement du territoire, justifiée par le désenclavement du Limousin ! Le cofinancement c'est la décentralisation à l'envers, puisque l'État ne décentralise pas la richesse mais finance l'aménagement du territoire pour les régions pauvres. Le Grenelle de l'Environnement devient une affaire de privilégiés. Avec le président Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa, la République Française est dévoyée : la fraternité vole en éclat !

Le 27 octobre 2009, à la nuit tombée, Poitiers était témoin d'une réunion publique mémorable. Réunion orpheline du président-député-maire de Poitiers Alain Claeys et de la députée Catherine Coutelle qui brillèrent par leur absence, à l'image de quasiment tout son conseil municipal et communautaire. Exception faite de quelques élus, tels Jean François Macaire (qui porta la parole de Ségolène Royal), le maire de Smarves Philippe Barrault ou Maryse Desbourdes (conseillère municipale de Poitiers dans l'opposition « gauche alternative »), nous avons ici un déni patent de démocratie représentative.

L'amphi J du Campus de l'Université de Poitiers dans lequel se déroulait la réunion était comble, les médias étaient nombreux, les opposants à la ligne LGV Poitiers-Limoges étaient mobilisés...


LGV : désengagement de l'État sur les rails
envoyé par kritixTV.
Suite à la lettre ouverte de la présidente de région Ségolène Royal, le désengagement de l'État est clairement démontré. Extraits de la réunion publique de RFF sur la LGV Poitiers-Limoges, le 27 octobre 2009.

20h33, RFF déclara, « Le TGV, ça va vite ! »
       Dans le public, avec une ironie incrédule, « On est bien parti ! »
       RFF, « Les échanges sont enregistrés et un compte-rendu sera mis en ligne. [...] Le projet a pour objectif le développement du centre ouest, avec une participation au développement économique qui renforce les liens entre Poitiers et Limoges. »
       Durant tout le prétendu débat publique, cette prétendue concertation exigée par la loi Barnier, il sera fait montre d'une simple publicité de décisions déjà entérinées ; ou presque, puisque la présidente Ségolène Royal est bien décidée à ne pas faire supporter la charge de ce projet gouvernemental aux contribuables de la région Poitou-Charentes, sans qu'ils aient été consultés, entendus, en vue d'un consensus équilibré sur les tracés et les participations financières. La fronde des maires ruraux est là pour en témoigner ! De concertation, il n'y aura que de la publicité, puisque selon RFF, les dés sont jetés...

Durant ce débat publique, la communauté d'agglomération de Poitiers ne fut pas représentée. Voici donc bien la preuve que la majorité socialiste de Poitiers soutient la politique de désengagement de l'État avec cette posture de la chaise vide devant les électeurs !
       Le maire-président Alain Claeys a privé de débat contradictoire les poitevins, ses administrés, les contribuables qui devront s'acquitter des modalités de ses choix politiques qui, en la circonstance, n'ont pas grand rapport avec ses engagements de campagne électorale. Mais que voulez vous, comme le disait si souvent son prédécesseur et ami Jacques Santrot, « être maire d'une ville comme Poitiers, c'est un métier à plein temps » ; or monsieur Claeys est député-maire...

Le collectif de Smarves, « On nous fait déplacer, alors que vous nous dîtes que la décision est prise ! Les Verts de la Vienne disent NON à la LGV ! » Le citoyen devrait payer presque 2 milliards pour gagner une demi-heure...

Préfecture de la région Poitou-Charentes, à Poitiers, en septembre 2009.
© kritix.com

RFF jargonna à tout va devant un mécontentement persistant. Des citoyens outrés par l'autisme de RFF, feront des interventions intempestives, tout au long des lieux communs égrainés d'une voix chevrotante par les locuteurs de Réseau Ferré de France. Les contribuables deviennent nerveux, s'impatientent : cette transparence absconse à des allures hiéroglyphiques.
       Les cofinanceurs, les citoyens-contribuables, sont en effet floués par le parlement français puisqu'ils ne sont pas consultés suivant l'esprit de la loi Barnier. Selon RFF qui bafouillait constamment et le comité des financeurs, cette ligne LGV a été décrété d'intérêt publique ; ce quidam omettant de préciser qui en paierait la facture.
       Le président Sarkozy de Nagy-Bocsa a détourné la décentralisation avec la complicité de la quasi totalité des grands élus, en désengageant l'État de ses obligations régaliennes de financement des infrastructures d'intérêt général dans l'aménagement des territoires et du désenclavement des populations. La présidente Ségolène Royal avait dû, il y a peu, financer un projet TER, suite à un autre désengagement de l'État. Mais cette fois, le projet est exorbitant et il ne revient pas à une collectivité bien gérée, d'assumer, au nom de la solidarité, un budget national de gaspillages : la dette flambe, les inégalités se creusent, la justice fiscale disparaît !

Des grands élus, seule Ségolène Royal se fit représenter par son vice-président Jean François Macaire. Les députés dédaignèrent le débat publique ! Les parangons de la transparence s'illustrent une fois de plus comme une piètre complaisance avec le pouvoir sarkozyste en place. Le sarkozysme achète les consciences ! C'est la raison pour laquelle Ségolène Royal entre en résistance et ne collabore pas avec le désengagement de l'État. L'Élysée veut faire payer aux régions socialistes les prérogatives régaliennes de la nation française ! Le président de la République française n'assure plus son rôle de protecteur des institutions nationales. Que fait la majorité des députés ? Ils entérinent !

Réunion publique sur la LGV Poitiers-Limoges, le 27 octobre 2009.
© kritix.com

Un contribuable, un cofinanceur de plus, porta haut la voix, « Vous proposez une LGV cul de sac ! À l'Est, il y a Limoges et la montagne et elle est dure [Ricanements kafkaïens, NDR]. On va attendre une centaine d'années [pour glaner les financements rêvés] ! Sur la ligne TGV de La Rochelle-Poitiers, il y a [encore] des passages à niveau. On peut [donc] adapter les lignes existantes ! [...] Il y a des milliards partout, il n'y a qu'à se servir [Une ironie dépitée parcourue l'amphi J, NDR] ! […] On a les bons copains du béton, vous savez les trois [Bouygues, VINCI et Eiffage, NDR]. [...] Ils vont la construire et on y fera ce qu'on veut dans la maison France ! » Le dépit fut partagé par un public écœuré que l'on en vienne à ironiser sur la paupérisation des français dû à quelques potentats faisant le jeu des privilégiés. L'intervenant se tourna vers le public et dit avec amertume et sarcasme, « Merci à vous tous ! Vous serez toujours là pour payer ! » La salle scanda son mécontentement...

Le préfet Bernard Tomasini, absent, sans doute tourmenté par l'Angolagate et la condamnation de son ami le ministre de l'intérieur Charles Pasqua (L'ancien ministre de l'intérieur est condamné, le 28 octobre 2009, à un an de prison ferme et 100 000 euros d'amende. Il a fait appel.), avait endossé la responsabilité du projet LGV Poitiers-Limoges. Pour contenter Claude Guéant, secrétaire général de l'Élysée, il n'avait eu d'autre choix que de nier la légitimité des maires de campagne qui, en très grande majorité, refusèrent d'avaliser ce projet de LGV en l'état ; le maire de Smarves en tête. Les sans grades et les petits élus s'indignèrent contre le gouvernement Fillon : « RFF doit s'en tenir à la seule lettre de Ségolène Royal ! La LGV, on n'en veut pas ! On n'en veut pas ! »

Ainsi, par le gouvernement Fillon et sur injonction de Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa, RFF fut jeté en pâture aux citoyens en colère. La Sarkozie, c'est voter une politique puis laisser les fonctionnaires l'appliquer et encaisser les dérives de ces politiques dont ils ne sont que les exécuteurs.

Affiche de protestation lors de la réunion publique sur la LGV Poitiers-Limoges, le 27 octobre 2009.
© kritix.com

Dans le projet LGV Poitiers-Limoges, la région Poitou-Charentes est donneur d'ordre : un cofinanceur de taille entre autres collectivités territoriales. En tribun, impassible dans cette atmosphère électrique, le vice-président Jean François Macaire prit ses distances avec les unanimismes de Poitiers. Les députés Alain Claeys et Catherine Coutelle furent hués. Les citoyens contribuables et cofinanceurs lancèrent pèle-mêle « ce n'est pas les mêmes utilisateurs pour les mêmes trajets ! » « Merci d'être venu, enfin, dans les terres poitevines ! » Ironie contre le grenelle de l'environnement : « Tout le monde sait que se déplacer plus vite c'est écolo ! » La charivari et le chahut possédait l'amphi J : « Une réponse ! Une réponse ! Une réponse ! » RFF finit par provoquer : « Vous faites les questions et les réponses ! »
       Le chant démocratique reprit, « Les petits élus s'opposent aux grands ! » La fracture sociale du président français Jacques Chirac est consommée. RFF fit fi des mouvements et tenta d'endormir son auditoire. Circulez y a rien à voir !

Authentique alchimie que ce lynchage de la concentration des pouvoirs et que cette condescendance des grands élus face à l'exception portée par l'élu Jean François Macaire, représentant l'incontournable donneuse d'ordre Ségolène Royal. La présidente a le pouvoir de renégocier le projet des grands élus d'ici quelques jours.

Alors que la délégation de RFF égrainait des lieux communs rébarbatifs, un citoyen lança excédé, « T'es en train de lire un livre ! » Le locuteur à l'allure très méprisante, dédaigneuse et technocratique, avec ce pince sans rire des heures sombres de notre histoire, « Désolé, je n'ai pas de papier ! »
       Le maire de Smarves, élu d'une commune qui sera défigurée par la LGV, afficha vertement son indignation : « Les élus ont découvert le projet fin avril 2009. On a été convoqué par le préfet. [...] C'est faut ! Les maires n'ont pas acté ! Le 6 juillet [2009] on se prononce. Je reçois la réponse le 16 octobre. RFF devrait mettre son secrétariat sur LGV ! [La salle ria à gorge déployée ! NDR] On nous a demandé de nous prononcer en 4 jours. Les maires ont dit NON ! Le préfet, déçu, a dit que ce serait de sa responsabilité [d'entériner le projet malgré tout] ! » Des voix crièrent « C'est ça la concertation ! » Le maire reprit, « La concertation, j'y pensais pas ! Merci ! Alain Claeys n'est pas solidaire des petits maires ! Il y a un mépris, de la condescendance pour la démocratie locale ! Il faut aménager la ligne existante, [ce qui fera] une heure maximum pour un Poitiers Limoges. Je suis pour le désenclavement du Limousin ! » Le maire de Smarves, lâché par la CAP, poursuivit, « Les paysages vont être impactés sur 1200 hectares. C'est une Vienne mutilée ! Vous allez droit dans le mur : c'est une économie déficitaire durable ! Les parlementaires ne sont pas dans la salle ; ces grands élus ! » Puis il s'adressa spécifiquement à RFF, « Votre rôle de conseil aux grands élus sur la LGV devrait considérer que cette ligne est une absurdité sans limites ! Pour le contribuable : un cauchemar ! », tonnerre d'applaudissements... Une clameur emporta la foule... La tribune RFF se glaça...

Bureau du préfet de la région Poitou-Charentes, septembre 2009.
© kritix.com

C'est dans l'anarchie et dans un climat insurrectionnel que se terminera cette réunion publique, sous les cris, RFF conspuée ! « Menteur, vous n'étiez pas disponibles ! Nous réclamons, comme l'a réclamé monsieur Macaire, un vrai débat publique ! Vous n'êtes que des pantins ! C'est de la propagande ! Vous êtes des nuls ! On n'en veut pas ! », la passion l'emporta devant la placidité des technocrates à l'efficacité éprouvée.
       Alors que la foule baissait d'un ton, RFF provoqua les citoyens en colère, « Maintenant que le calme est revenu... » Les citoyens sifflèrent et l'on entendit, comme sorti des tripes un « Aux ch.... le préfet ! » Le préfet Bernard Tomasini n'y est pourtant pour pas grand chose, étant donné qu'il répond des oukazes du président de la République française ; la pauvre ! En apartés, RFF fera part de son désappointement devant les incivilités proférées durant le débat publique.

A 23 h, la salle se leva comme un seul homme, se vida ; l'autorité renversée, les citoyens mirent fin à la mascarade sarkozyste et appelèrent de leurs vœux une démocratie réellement participative.

ANNEXE
Au soir du 2 novembre 2009, le préfet Bernard Tomasini et RFF tenaient nuitamment à la préfecture de Poitiers, une concertation inédite avec les associations et collectifs opposés à la LGV, mais sans les grands élus !
       Bernard Tomasini observa contraint par la présidente de région Ségolène Royal, ce formalisme, avant la délicate réunion du comité des financeurs, composé des collectivités territoriales et de l'Etat, devant se tenir le 6 novembre 2009 à Limoges.


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