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Raffarin décentralisé ?
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2ème Chronique
Raffarin décentralisé ?
Kritix, le Monday 11 November 2002 -
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Quid de l'état de l'UMP ? Qu'en est-il de la querelle Debré/Raffarin ? Ce n'est pas un euphémisme que de constater un trouble certain à l'UMP ! Qui est le véritable chiraquien...??? Est-ce que cela existe seulement ? Tout cela pourquoi...pour conjurer quoi...? OOOOh, rien sinon les escarmouches et incartades UMPiennes à l'encontre de Raffarin II et son projet de réforme sur la décentralisation en France... Que nenni, pas de révoltes parlementaires à l'horizon ! Il va falloir la discipliner cette majorité, à moins que le sieur Chirac tente sa dissolution accadabrantesque de 1997 ! Le magicien Chirac excelle dans l'art de surprendre les siens ! Qu'il s'amuse donc, mais pas avec la France ! Raffarin, au travail ! Voilà, voilà, et pour savoir le pourquoi du comment, commençons par le commencement... L'Été passé, venait l'automne, les feuilles se coloraient, lesquelles étaient raturées pour le plus grand plaisir de Jean Pierre R. dans le parc de Matignon... C'était un 17 septembre de l'année 2002, J.P.R, fier de son projet quittait les pelouses de Matignon, pour celles du Luxembourg... et prendre d'assaut le palais sénatorial pour réveiller les septuagénaires ! Tout grand seigneur qu'il est, J.P.R tint non sans courage avec une quinzaine de sénateurs de l'opposition un "déjeuner républicain". Les convives ivres évoquèrent ses projets de décentralisation. Le président du Sénat Christian Poncelet fit merveilles et feux de toutes vaisselles tant cette initiative a valu au Premier ministre un satisfecit de l'ancien chef de gouvernement socialiste Pierre Mauroy, qui s'est dit d'accord avec lui sur les "concepts" et "l'esprit". "C'est un vrai décentralisateur. Il parle d'ailleurs très bien de la décentralisation", estima l'ancien maire de Lille, auteur d'un rapport sur la question commandé par Lionel Jospin. "Le vrai problème c'est l'application", a-t-il cependant ajouté. "On sent bien que l'État n'a pas beaucoup d'argent. Or faire la décentralisation, c'est faire des transferts. Ce n'est pas concevable sans que l'État apporte l'équivalent" en matière de ressources aux collectivités locales. Selon un autre participant, J.P.Raffarin a confirmé que le projet de loi constitutionnelle ouvrant la voie à une nouvelle phase de la décentralisation, qu'il entendait soumettre en octobre au Sénat, était pour lui un texte "prioritaire". D'après le sénateur Jean-Pierre Masseret, ancien membre du gouvernement de Lionel Jospin, Jean-Pierre Raffarin a par ailleurs déclaré que le gouvernement n'avait pas de projet de réforme du Sénat, auquel il laisse l'initiative. Le Premier ministre a également évoqué ses projets de réforme des modes de scrutin, notamment pour les élections régionales et européennes. Selon les participants, il entend maintenir la législation actuelle pour les régionales, mais en relevant les seuils de suffrages pour les fusions (3%) et le maintien de listes (5%) au second tour. Il s'est aussi dit favorable à l'organisation des européennes dans un cadre régional. Après avoir amadouer la gauche sénatoriale, Raffarin confirma le 6 octobre son intention de suspendre une partie des mesures de décentralisation votées sous le gouvernement de son prédécesseur socialiste, L.Jospin. "J'ai demandé au Parlement, notamment au Sénat mais aussi à l'Assemblée nationale (...) de nous préparer tout de suite un texte de suspension pour 12 à 18 mois d'un certain de nombre de dispositifs qu'il faut aujourd'hui rebâtir", a déclaré Raffarin devant un millier d'élus et de cadres chiraquiens de l'UDF qui ont décidé de rejoindre l'UMP. Il s'agit de "procédures qui font que les territoires aujourd'hui sont complètement dans la difficulté", a expliqué le chef du gouvernement. "Donc on va toiletter ça. La seule façon c'est d'identifier sur les quatre lois - celle de M. (Daniel) Vaillant, celle de M. (Jean-Claude) Gayssot, celle de Mme (Dominique) Voynet et celle de M. (Jean-Pierre) Chevènement - un certain nombre d'articles qui sont des articles paralysants." "On les suspend pour rebâtir (...) un texte plus unifié qui nous donnera une cohérence globale d'intervention et qui permettra aux élus d'être en harmonie avec les citoyens", a-t-il ajouté. Le conseil des ministres doit examiner le 16 octobre un projet de loi constitutionnelle, dont Raffarin veut faire la base d'une nouvelle étape de la décentralisation. "Nous sommes dans une approche qui n'est plus celle simplement de la décentralisation, nous sommes dans une approche qui est la modernisation de la République, de nos institutions", a-t-il expliqué. Sans coup férir, courageux mais pas téméraire, l'arbalétrier Raffarin déclara un 11 octobre qu'il entendait passer outre à un avis négatif du Conseil d'État sur le projet de loi constitutionnelle, qui doit donner le coup d'envoi de sa réforme de la décentralisation. "Le Conseil d'État est le Conseil d'État, ce n'est pas le conseil des collectivités locales", a déclaré "monsieur Formule", à l'issue d'une réunion avec les préfets de région. Prié de dire si l'avis du Conseil d'Etat l'empêcherait d'avancer dans son projet de réforme, il a répondu "Certainement pas". Dans cet avis, le Conseil d'État propose de "disjoindre", c'est-à-dire de supprimer plusieurs dispositions de ce projet de loi de 10 articles. Il rejette ainsi le premier de ces articles qui modifie l'article premier de la Constitution selon lequel "la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale", en y ajoutant la phrase: "Son organisation est décentralisée". Selon une source gouvernementale, il propose aussi de supprimer un alinéa de l'article 3 qui prévoit que "les projets de loi ayant pour principal objet la libre administration des collectivités locales, leurs compétences ou leurs ressources" seront "soumis en premier lieu au Sénat". Pour le Conseil d'État, la tradition de la Ve République veut en effet que ce soit la chambre élue au suffrage universel direct, c'est-à-dire l'Assemblée nationale, qui soit saisie la première sur les textes importants. Il propose également de supprimer le deuxième alinéa de l'article 4 qui introduit le principe Raffarin et J.F.Copéde subsidiarité en affirmant que les collectivités locales "ont vocation à exercer l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à l'échelle de leur ressort". Il s'oppose à un passage de l'article 4 qui dispose que le représentant de l'État (le préfet) au niveau local est le représentant "de chacun des membres du gouvernement". Surtout, le Conseil d'État propose de supprimer un alinéa de l'article 6 disposant que "les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités et les dotations qu'elles reçoivent d'autres collectivités territoriales représentent une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources". C'est une disposition-clé du projet de loi, souligne-t-on au ministère des Libertés locales, car "plus de compétences va de pair avec une autonomie financière accrue". Autrement dit, supprimer cette disposition viderait de sa substance le projet de réforme de Raffarin. "Le gouvernement n'a pas du tout l'intention de renoncer à son projet", a commenté le ministre délégué aux Libertés locales, Patrick Devedjian, après la réunion des préfets. "Donc il maintiendra les principes qu'il a énoncés. Le Conseil d'État doit donner des avis juridiques et pas des avis d'opportunité." Son entourage affirme que l'avis du Conseil d'État n'a pas été une surprise - "On sait que le Conseil d'État est contre la décentralisation, Patrick Devedjian n'était pas étonné." L'information est tombée le jour où J.P.R.réunissait à Matignon tous les préfets et présidents de région pour leur exposer ses projets en matière de décentralisation. Le président UMP de la région Bourgogne, Jean-Pierre Soisson, a estimé à son arrivée que l'avis du Conseil d'État ne "remettait pas du tout en cause l'ensemble du projet". Le président UMP de la région Lorraine, Gérard Longuet, président de l'Association des régions de France, a pour sa part nié que l'avis du Conseil d'État soit un "coup dur" pour le gouvernement. "Il y a encore des batailles culturelles à conduire dans ce pays parce que l'idée de refuser à la France d'être décentralisée est une idée absurde", a-t-il dit. "La France doit être décentralisée et les territoires doivent prendre leurs responsabilités", a-t-il ajouté. "Ce n'est pas un coup dur ; c'est une bataille intellectuelle ; nous voulons libérer ce pays et on s'aperçoit que culturellement il y a des gens qui n'y sont pas favorables." Le projet de loi consacre l'existence de la région, renforce les pouvoirs et l'autonomie financière des collectivités locales, autorise l'expérimentation de transferts de compétences et l'organisation de référendums d'initiative locale. Il dispose notamment que les collectivités locales pourront "déroger à titre expérimental aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leur compétences", sauf si cela remet en cause "les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit fondamental". Ce droit à expérimentation pourrait aussi porter sur l'organisation et les ressources des collectivités locales. Ne voulant pas laisser "champ libre" à JPR, les socialistes préparèrent un contre-projet à cette réforme phare sur la décentralisation. Le PS n'a pas de "position a priori fermée" dans le débat sur la décentralisation mais réclame des clarifications dans le projet présenté par le gouvernement Raffarin II. "Notre volonté est clairement de faire avancer la décentralisation", a déclaré V.Peillon, porte-parole du PS. "Il n'y a aucune position de notre part qui soit une position a priori fermée dans le débat qui s'engage mais il y a par contre de très vives inquiétudes et de vives insatisfactions aussi", a-t-il poursuivi le 14 octobre. Pour le PS, qui présentera un contre-projet, la réussite de la décentralisation repose sur trois conditions que le gouvernement Raffarin, affirme-t-il, ne remplit pas. En premier lieu, le PS réclame une "clarté suffisante". "Ça n'est pas le cas avec les propositions qui Raffarin à Strasbourgsont faites et en particulier la méthode proposée sur les expérimentations", a déclaré Peillon. Ces politiques publiques doivent en second lieu être accompagnées de transferts de ressources. "Là encore, c'est un point aveugle des propositions qui sont faites", a-t-il dit. Enfin, la réussite dépend de la solidarité des territoires. "Il y a des différences entre les territoires français qui sont extrêmement importantes en termes économiques, en termes sociaux, en termes de durée de vie", a expliqué le porte-parole. "Cette solidarité suppose que l'on renforce les mécanismes de péréquation qui existent (...) et ce n'est pas, à ce stade, ce qui est indiqué", a-t-il ajouté. Le conseil des ministres examine mercredi le projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation, que Jacques Chirac a défendu à Troyes, dans l'Aube, à l'occasion de son premier déplacement en province depuis les élections législatives. J.C a exhorté les Français à s'engager "sans crainte" sur la voie de la décentralisation, une réforme constitutionnelle qui introduira à ses yeux "plus de démocratie, plus de responsabilité, plus d'efficacité". "En faisant toute sa place à la démocratie de proximité, la réforme constitutionnelle sur les libertés locales contribuera à remettre en mouvement l'État et notre vie démocratique", a déclaré le chef de l'État. "Il faut nous engager sur cette voie sans crainte, sans redouter qu'elle puisse se traduire par l'affaiblissement de notre unité nationale", a-t-il souligné. Notre nation, a poursuivi J.Chirac, "n'a nul besoin du corset du centralisme pour se tenir debout, pour faire vivre son unité, pour défendre les principes auxquels les Français sont attachés". "L'organisation de notre République est beaucoup trop pyramidale et elle doit être décentralisée. La réforme constitutionnelle introduira dans nos institutions, en métropole et outre-mer, plus de démocratie, plus de responsabilité, et donc plus d'efficacité", a-t-il dit. J.C n'a pas fait référence aux réserves exprimées par le Conseil d'État sur le projet de loi, approuvant notamment le principe controversé de l'autonomie financière ou du référendum local. Le conseil des ministres a adopté le 16 octobre, le projet de loi constitutionnelle qui sera la clef de voûte du projet de réforme cher au Premier ministre. Vingt ans après les premières lois de décentralisation, ce texte inscrit pour la première fois dans la constitution que l'organisation de la République française est "décentralisée". Il reconnaît également pour la première fois l'existence des régions au même titre que les autres collectivités territoriales. Il donne aux collectivités locales plus de pouvoir par le biais de transferts de compétences, une plus grande autonomie financière, un "droit d'expérimentation" et la possibilité d'organiser des référendums d'initiative locale. Il offre aux départements et territoires d'outre-mer un "statut propre" conforme aux spécificités et aux attentes de chacun et pouvant aller jusqu'à l'autonomie, tout changement étant subordonné au consentement des populations. Le président Chirac a cependant assuré que cette réforme, qui "rompt avec (la) tradition de centralisme administratif" de la France, "s'inscrivait pleinement dans le respect du principe d'unité nationale". Les Français "conserveront les mêmes droits et les mêmes devoirs, sur tout le territoire", a ajouté le chef de l'État dont les propos étaient rapportés par le porte-parole du gouvernement, J.F. Copé. "La solidarité entre les territoires continuera à s'exercer à travers la péréquation financière. L'État en sera le garant." Il a estimé que cette réforme visait à "plus de démocratie et à plus d'efficacité" mais que son "pendant indispensable" était la "réforme de l'État". "Il a indiqué qu'il attendait de chacun de ses ministres, sous l'autorité du Premier ministre, une très forte mobilisation pour conduire le processus d'adaptation des administrations aux besoins des usagers", a rapporté le porte-parole. "Cette réforme constitutionnelle sera la clef de voûte d'une nouvelle architecture du pouvoir", a insisté J.C. C'est le garde des Sceaux, D.Perben, qui a présenté le texte mais J.P.Raffarin en avait exposé auparavant la philosophie. Ce texte "permettra de fonder les bases constitutionnelles d'une République unitaire et décentralisée, afin de favoriser le développement d'une démocratie locale au service des citoyens, dans le respect de l'unité et de l'indivisibilité de la République", a-t-il déclaré. Il a indiqué que les Assises des libertés locales, qui commencèrent à Nantes et se dérouleront jusqu'en janvier 2003 dans chaque région de métropole et d'outre-mer, permettraient de recueillir les souhaits des collectivités locales en ce qui concerne leurs compétences. Un projet de loi organique, qui sera présenté en mars 2003, organisera ces transferts de compétences et le nouveau droit à l'expérimentation des collectivités locales. Le Conseil d'Etat avait rendu la semaine dernière un avis défavorable sur le projet de loi constitutionnelle. Le gouvernement a retouché quelque peu la rédaction de certains articles pour tenir compte de ses observations mais a maintenu en l'état l'essentiel du texte. "Le gouvernement est passé outre l'avis du Conseil d'Etat", a commenté le ministre délégué aux Libertés locales, P.Devedjian, à la sortie du conseil des ministres. Il a notamment souligné que le gouvernement avait été "ferme" sur le financement des collectivités locales - un des points sur lesquels le Conseil d'État avait tiqué. "Désormais ce financement est assuré par la constitution, ce qui n'était pas le cas notamment dans la décentralisation de 1982", a-t-il déclaré. "Les financements n'étaient pas garantis, ils le sont désormais. De même que la péréquation qui assure l'égalité (entre les collectivités). Jusque-là on en parlait, dorénavant c'est un droit: l'égalité des territoires est protégée par la constitution. Les Français et les résidents seront à égalité sur tous les points du territoire." "Bien entendu, les principes financiers inscrits dans la constitution auront des suites et conduiront à des réformes", a conclu P.Devedjian. "La réforme de la constitution est la mère des autres réformes." Reste à savoir quelle procédure - référendum ou Parlement réuni en Congrès - choisira le président de la République pour faire ratifier la loi constitutionnelle, une fois qu'elle aura été votée par l'Assemblée nationale et le Sénat. "Nous n'en sommes pas encore là", a déclaré J.P.Raffarin à l'issue du conseil des ministres. Raffarin a donc confirmé qu'il entendait faire de la décentralisation un "levier" de la réforme de l'État, que ses prédécesseurs de gauche ou de droite n'ont pu mener à bien. Le conseil des ministres a adopté un projet de loi constitutionnelle, clef de voûte d'un "acte II" de la décentralisation dont le chef du gouvernement se veut le maître d'oeuvre. "Nous avons engagé une démarche de profonde modernisation de nos institutions républicaines qui commence par une loi constitutionnelle", a déclaré J.P.Raffarin lors de la séance des questions d'actualité à l'Assemblée nationale. "Ce projet de loi constitutionnelle nous donnera cinq grands leviers de changement." Il a cité les transferts de compétences aux collectivités locales et l'application du principe de subsidiarité, censés favoriser les décisions au niveau le plus approprié. Il a également mentionné le droit à l'expérimentation de nouvelles compétences, l'autonomie financière des collectivités locales, le principe de "péréquation", c'est-à-dire de répartition des ressources, et "l'appel aux citoyens" par le truchement de référendums d'initiative locale et d'un "droit de pétition". "Au début des années 1980, les lois (de décentralisation) Defferre et Mauroy ont donné un nouvel élan territorial à la France", a souligné J.P.Raffarin. "Mais, depuis, le centralisme, la bureaucratie, les lourdeurs et les lenteurs sont venus porter atteinte à l'initiative, à l'énergie des territoires." Pour le Premier ministre, cependant, cet "acte II" de la décentralisation est de toute évidence aussi un moyen de contourner les obstacles auxquels se sont jusqu'ici heurtées les tentatives de réforme en profondeur de l'État. Dans l'histoire politique récente, ces tentatives avortées et les réactions sociales qu'elles ont suscitées ont contraint à la démission deux ministres de son prédécesseur socialiste Lionel Jospin - Claude Allègre (Education) et Christian Sautter (Économie et Finances). Jean-Pierre Raffarin a sans doute aussi à l'esprit les grandes grèves de la fin 1995, qui avaient déstabilisé le gouvernement du Premier ministre RPR Alain Juppé. Aussi semble-t-il avoir choisi le détour de la décentralisation plutôt que de prendre de nouveau le risque d'attaquer "bille en tête" la réforme de l'administration centrale. Il ne s'en était d'ailleurs pas caché dans son discours de politique générale, le 3 juillet. Il avait alors estimé que la décentralisation était un "formidable levier pour réformer l'État" et faire les "indispensables réformes de structure". L'exposé des motifs du projet de loi constitutionnelle est tout aussi explicite: "Une République plus efficace, c'est un État qui sait maîtriser ses dépenses et simplifier ses structures. La décentralisation est la première réforme de l'État", lit-on dans ce texte. "Elle lui permettra de mieux exercer ses missions régaliennes et de solidarité." "Parallèlement, le gouvernement favorisera les réformes souhaitées par les collectivités en les aidant à aller dans le sens de la simplification et des économies souhaitées par nos concitoyens", ajoutent ses auteurs. Ces réformes semblent d'autant plus impératives pour le gouvernement, qu'il est confronté à la nécessité de maîtriser les dépenses de l'État dans un contexte économique difficile, pour tenir les engagements européens de la France. L'opposition de gauche s'inquiète pour sa part de l'usage que le gouvernement pourrait faire, selon elle, de cette réforme, notamment en déchargeant l'État de missions coûteuses sur les collectivités locales. "La décentralisation serait la pire des choses si elle était le cheval de Troie d'une idéologie libérale réduisant l'État et ses grandes politiques publiques aux acquêts", a ainsi déclaré Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS à l'Assemblée. L'ancien ministre socialiste Ségolène Royale a pour sa part estimé que ce texte aurait pour conséquences une "explosion des impôts locaux" et un "affaiblissement des services publics". Les députés UDF estiment au contraire que le gouvernement doit aller plus loin dans la réforme de l'État. "La décentralisation ne sera réussie que si et seulement si on a le courage de supprimer les administrations qui n'auront plus aucune raison d'être dès lors qu'on aura transféré des compétences aux communes, aux départements et aux régions", a déclaré Hervé Morin, président du groupe UDF. Pour sa part, J.Chirac a affirmé que la nouvelle étape de la décentralisation lancée par le projet de loi constitutionnelle adopté en conseil des ministres respecterait "pleinement" le "principe d'unité nationale". Il s'exprimait après la présentation de ce projet de loi par Raffarin, et le garde des Sceaux, Perben. Le porte-parole du gouvernement, Copé, a précisé que le chef de l'État avait souhaité "faire observer que cette réforme d'une très grande importance rompait avec notre tradition de centralisme administratif". "Il a en outre indiqué qu'elle s'inscrivait pleinement dans le respect du principe d'unité nationale", a ajouté J.Chirac qui a assuré que les Français "conserveront les mêmes droits et les mêmes devoirs sur tout le territoire." "La solidarité entre les territoires continuera à s'exercer à travers la péréquation financière. L'État en sera le garant", a-t-il également affirmé. J.Chirac a estimé que cette réforme visait à "plus de démocratie et à plus d'efficacité" et a souligné que l'instauration du référendum local et d'un droit de pétition donnerait aux Français "de nouveaux moyens d'expression et petit à petit de nouveaux comportements". Il a également estimé que le droit à l'expérimentation, introduit dans la constitution par le projet de loi, permettrait de "reconnaître l'initiative" des citoyens. Il s'est efforcé de répondre aux craintes concernant le financement des collectivités locales et son impact sur les prélèvements obligatoires. "L'autonomie financière des collectivités locales sera garantie. Elle renforcera la responsabilité, la transparence et le contrôle démocratique sur les dépenses publiques", a-t-il dit. "Tout transfert de compétences s'accompagnera du transfert de ressources correspondantes et c'est là un principe fondamental." Chirac a insisté sur le fait que la réforme de l'État était "le pendant indispensable" de la réforme de la décentralisation. "Il a indiqué qu'il attendait de chacun de ses ministres, sous l'autorité du Premier ministre, une très forte mobilisation pour conduire le processus d'adaptation des administrations aux besoins des usagers", a rapporté Copé. "Cette réforme constitutionnelle sera la clef de voûte d'une nouvelle architecture du pouvoir", a insisté Chirac. Il a enfin indiqué qu'il souhaitait "ardemment que ce projet, si important pour l'avenir des Français, fasse l'objet d'un débat approfondi à travers le pays", car, a-t-il dit, "c'est le devenir des Français qui est en cause." Ce débat national sera l'objet des Assises des libertés locales qui ont commencé à Nantes et se poursuivront dans chaque région jusqu'en janvier 2003. Des lois organiques seront élaborées au printemps prochain pour traduire concrètement la révision de la constitution. Elles fixeront notamment les conditions générales des transferts de compétences aux collectivités territoriales et de l'exercice de leur nouveau droit d'expérimentation. Deux tiers des Français estiment que la décentralisation correspond bien à une prise en compte des attentes de la population, selon un sondage BVA réalisé pour le service d'information du gouvernement. Sept Français sur dix considèrent que ce transferts de pouvoir de l'État vers les collectivités locales est une bonne chose pour la qualité des services publics locaux, selon ce sondage réalisé auprès de 1.067 personnes du 4 au 7 octobre et publié le 21 octobre. Pour la même proportion de Français, la décentralisation favorise un développement de leur lieu de résidence. Pour 59% d'entre eux ce transfert des pouvoirs a des conséquences positives sur la transparence des décisions et l'information des citoyens. Raffarin a présenté devant le Sénat le 29 octobre son texte de loi sur la décentralisation, qui vise à moderniser la France et à mettre la "République des proximités" à "l'écoute des citoyens". Il s'est donné "150 jours" pour réussir sa réforme. "Le moment est venu de passer à l'acte II de la décentralisation (...) Que la République se partage et s'exprime dans les proximités", a-t-il lancé. Le projet de Raffarin, qui paraissait consensuel, commence cependant à susciter des inquiétudes car il replace la question corse au coeur des débats. Le texte autorise en effet les collectivités locales à procéder à des expérimentations sortant du cadre national pendant une durée de cinq ans et leur accorde des transferts de compétences. Il prévoit également que le Parlement pourra autoriser l'organisation d'un référendum local sur l'avenir institutionnel d'une collectivité. Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, s'est inquiétée d'un texte "qui vise à éclater la République" et risque d'entraîner "une République à plusieurs vitesses". Elle a donc préconisé un "vaste débat public" et réitéré sa demande d'un référendum national après la discussion du texte devant les deux assemblées. Pour une partie des élus corses, en particulier les conseillers généraux qui redoutent la disparition des deux départements corses, ce projet est en réalité adapté spécifiquement à la Corse. Certains considèrent qu'il va plus loin et plus vite que les accords de Matignon engagés en 2000 par Lionel Jospin, et que les indépendantistes risquent de s'engouffrer dans la brèche. "On légifère pour la Normandie ou l'Alsace en apparence, mais en réalité pour la Corse. Le gouvernement va-t-il se défausser de ses responsabilités politiques ?", a ainsi déclaré le sénateur PRG Nicolas Alfonsi. "Le processus engagé risque d'être irréversible. Pourquoi instituer des mesures dangereuses pour les départements ?", a ajouté le conseiller général de Corse-du-Sud pour qui "le référendum va être le ver dans le fruit". Les accords de Matignon ne prévoyaient de réforme constitutionnelle qu'en 2004, pour permettre notamment la tenue d'un référendum en Corse. Or, le dispositif du gouvernement Raffarin serait applicable plus tôt. Le Premier ministre n'a pas exclu la tenue d'un scrutin populaire en Corse sur le statut territorial, si le Parlement l'autorise comme le prévoit son projet. Devant les sénateurs, le chef du gouvernement a insisté sur sa volonté de tenir les promesses électorales, dont celle de la décentralisation, qui ne doivent pas rester "cantonnées aux frontons des édifices publics". Il a également invité les élus à en finir avec la "méfiance" caractérisant actuellement, selon lui, les relations entre l'État et les collectivités. "Les Girondins n'ont pas peur des consultations populaires. La décentralisation, c'est la confiance populaire. Nous ne voulons plus de cette méfiance généralisée, voilà pourquoi il faut une organisation décentralisée de la République", a-t-il dit. Le Premier ministre a réaffirmé les grands "leviers" sur lesquels repose son projet: le transfert de compétences aux collectivités territoriales qui va "libérer les énergies", les expérimentations, qui devraient être lancées dès juillet prochain, le principe de péréquation, l'autonomie financière des collectivités territoriales et, enfin, l'appel aux citoyens. "La décentralisation ne peut être une affaire d'experts et d'élus seulement. La République est à tous, voilà pourquoi nous sommes attachés au référendum territorial: les citoyens doivent avoir la parole", a-t-il insisté. Aussi a-t-il estimé que le référendum local sur la Corse proposé par le président de l'Assemblée de Corse, José Rossi, et évoqué par le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy, allait dans "la bonne direction". "Dans le débat sur la Corse, important et difficile, les élus peuvent proposer des perspectives qui mobiliseront les citoyens. Le référendum simplifiera nos institutions", a-t-il dit. Le débat sur le projet de loi constitutionnelle sur la décentralisation, cher à Raffarin, a pris une nouvelle tournure après la mise en garde de Jean-Louis Debré du 31 octobre et embarrasse désormais le gouvernement. La décentralisation, "ce n'est pas le bazar, ce n'est pas une grande braderie qui laisserait la République en morceaux", avait déclaré le président de l'Assemblée nationale (UMP) J.L.Debré, lors des Assises des conseils généraux à Strasbourg. Réputé proche de J.Chirac, J.L.Debré avait lancé une mise en garde contre "l'intégrisme décentralisateur". Une partie de la presse s'est demandé si ce fidèle de J.C., n'avait pas agi avec l'aval du chef de l'État. Le président de l'Assemblée nationale a fait savoir au Parisien-Aujourd'hui que le président de la République n'était absolument pas au courant de son discours. Mais Le Monde a souligné que J.L. Debré semblait "relayer, en les amplifiant, les remarques faites par le chef de l'État lors de la présentation du projet de loi en Conseil des ministres, le 16 octobre". Jacques Chirac avait notamment expliqué que cette réforme "ne parle pas directement aux Français". Devedjian a souligné que le président de la République était "l'initiateur du projet" par son discours du 12 avril à Rouen et que l'esprit de la décentralisation transcendait tous les partis politiques. Jusqu'ici seule la gauche avait émis de sérieuses critiques contre ce projet de loi, dont le Sénat a entamé l'examen. L'Assemblée nationale examinera à son tour le projet fin novembre. "Pour le moment, tout cela manque un peu de clarté", a commenté Charles Pasqua sur LCI. Il a dit "comprendre les préoccupations" de J.L.Debré. Le président du RPF a exprimé ses inquiétudes sur un texte qui "porte en germe ou risque de porter en germe la désagrégation de la Nation". De nombreux élus de la majorité, principalement ceux issus du RPR, formation gaulliste aujourd'hui fondue dans l'UMP, s'inquiètent du projet de loi de Raffarin. La socialiste Ségolène Royal a résumé sur RTL la situation en affirmant que le président de l'Assemblée avait "eu le courage de dire tout haut ce que beaucoup de parlementaires de droite pensent tout bas". La député socialiste des Deux-Sèvres, qui doit prochainement présenter un contre-projet, a vivement critiqué le texte gouvernemental affirmant qu'il ne tenait pas compte de "l'alerte donnée" par le Conseil d'État et "des critiques extrêmement sévères des juristes". Il risque, a-t-elle souligné, de se traduire par une hausse des impôts locaux. Tout comme la majorité, la gauche est divisée sur le dossier de la décentralisation. Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF et député, s'inquiète d'un texte "qui vise à éclater la République" et qui, affirme-t-elle, risque de faire naître "une République à plusieurs vitesses". Les Verts ont adopté, lors de leur Conseil national interrégional, une motion dans laquelle ils demandent que la réforme de décentralisation s'inscrive "dans le cadre d'une réorganisation globale des institutions publiques et d'une démocratisation de leur fonctionnement pour les rapprocher du citoyen" et "s'inquiètent des contradictions et des lacunes contenues dans le projet gouvernemental, qui porte en lui les prémices d'un enlisement prévisible". La réforme s'annonce donc beaucoup plus difficile à maîtriser que prévu pour le chef du gouvernement, qui a fait de ce thème un enjeu majeur de son action à l'hôtel Matignon. Le Sénat, pourtant largement acquis à la droite et connu pour sa volonté décentralisatrice, a ainsi décidé de batailler ferme. Outre la gauche, minoritaire, qui s'est ressoudée à l'occasion pour dénoncer ce projet de loi, la majorité, plus particulièrement au sein de la commission des Lois, multiplie les amendements, quitte ensuite à les retirer après de longues négociations avec le garde des Sceaux, D.Perben. Si l'article premier du texte - qui dispose que "la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale" mais que "son organisation est décentralisée" - a été adopté dans les termes voulus par le gouvernement, les débats se poursuivent parfois dans la tension. 240 amendements furent examinés, ce qui retarda de près d'une semaine le projet de loi sur la sécurité intérieur emmenée par Sarkozy (ministre de l'intérieur) ! A l'Assemblée, Raffarin s'est dit prêt, selon le quotidien Le Monde, à engager sa responsabilité sur son projet de loi. Poncelet, Raffarin et J.L.DebréPatrick Devedjian a relativisé le 2 novembre, la mise en garde de J.L.Debré à propos du projet de loi sur la décentralisation, réforme fétiche du Premier ministre. Dans une interview au Monde, daté du 3 novembre, le ministre délégué aux Libertés locales veut croire que le président UMP de l'Assemblée nationale, "tout en exprimant ses craintes, sera solidaire du projet gouvernemental". "Jean-Louis Debré exprime les inquiétudes traditionnelles de la sensibilité jacobine de la France", explique P.Devedjian, pour qui "il est normal que les inquiétudes s'expriment". Jean-Louis Debré a semé le trouble dans la majorité en se livrant à Strasbourg, devant les conseillers généraux, à une vive attaque contre "l'intégrisme décentralisateur". Toujours chatouilleux concernant la constitution écrite par son père, Jean-Louis Debré a mis en garde en fait contre une décentralisation excessive, mais son intervention a révélé au grand jour les réserves d'une partie de la majorité. Raffarin aurait confié au quotidien Le Monde être prêt à engager sa responsabilité face au critiques des "jacobins de droite comme de gauche". "Il en va du renouveau de la République et de notre capacité à faire sauter les blocages de notre pays", aurait-il dit. L'information n'a été ni confirmée, ni démentie et la "détermination" affichée par le Premier ministre n'a pas mis fin aux spéculations, une partie de la presse se demandant si J.L.Debré, fidèle de Chirac, n'a pas agi avec l'aval du chef de l'État. Le président de l'Assemblée nationale a fait savoir au Parisien-Aujourd'hui que le président de la République n'était absolument pas au courant de son discours. Mais Le Monde souligne que J.L.Debré "semble relayer, en les amplifiant, les remarques faites par le chef de l'État lors de la présentation du projet de loi en Conseil des ministres, le 16 octobre". J.Chirac avait notamment expliqué que cette réforme "ne parle pas directement aux Français". Cependant, Devedjian a souligné que le président de la République était "l'initiateur du projet" par son discours du 12 avril à Rouen et que l'esprit de la décentralisation transcendait tous les partis politiques. Selon lui, J.L.Debré demande en fait que le droit à l'expérimentation, dont bénéficiera notamment la collectivité territoriale de Corse, soit encadré. "Le Sénat a d'ailleurs déjà apporté un début d'encadrement, qui sera complété par la loi organique", ajoute Devedjian. Raffarin était déjà confronté aux réserves d'une partie des sénateurs UMP, qui veulent amender son texte, et sa réforme s'annonce plus ardue que prévu... Affaire à suivre fin novembre, début décembre au palais Bourbon devant les députés jacobin, on en tremble déjà...!!! |
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