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3ème Chronique

Le bipartisme se cannibalise

Kritix, le Saturday 2 April 2011 - 5488 consultations - Commenter la chronique

Réduire la politique au bipartisme, c'est tuer à terme l'alternative politique. Or, en démocratie républicaine, cette alternative est impérative. En France, on en est là ; faute de forces de propositions institutionnelles, les connivences finissent toujours par corrompre le faillible. Selon Charles-Louis de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu, la séparation des pouvoirs doit annihiler la concentration des pouvoirs. Tous les élus prétendent s'y soumettre, beaucoup la détourne à des fins partisanes.

Le bipartisme ou l'absolutisme de l'impasse

Chapiteau de l'église Montierneuf à Poitiers.
© kritix.com

Parce que la France relève de valeurs constituantes, sa vitalité essaime en-dedans et au-dehors d'une géographie souveraine. Connivences bipartites, désarmantes politiques, Casamance du pire. La négritude s'étiolerait-elle ? Cette France de l'international, cette voix répond du sourd écho bureaucratique, strident parfois, qu'un personnel politique aux boniments majoritairement ampoulés tarde à mesurer, à ses dépens. Voyez plutôt l'avanie électorale, an 2011, du bipartisme.

L'abstention, le fatalisme, l'absence de souffle programmatique, le cynisme tendance, la parole donnée bafouée, les valeurs non défendues, le consensus de gouvernement jusqu'au reniement, sont autant de maux d'une France contemporaine qui écrit et écrira court, moyen et long terme ! Avec la silencieuse complicité de bien trop d'élus repus, c'est une France errante qui nous occupe.

Les cantonales 2011 laissent la patrie de Pierre Mendès France face à ses démons. Et les institutions dévoyées d'en cannibaliser la contre-nature pétrification de la classe politique. Le cumul des mandats, entre autres régressions, génère l'insolente abstention. Les connivences bipartites eurent raison du front républicain. Quant à la nation, elle est abandonnée aux extrémismes ! Et le bipartisme de s'étonner de la montée de ces extrémismes ! Ce qui se produit dans une patrie négligée, citoyens, n'est autre, en la circonstance, que les fourvoiements du bipartisme français ; lequel est infesté de dérégulations du libéralisme économique éculé.

François Mitterrand quittant l'Élysée : « Après moi, il n'y aura plus que des comptables »

Le parti socialiste de François Mitterrand fut trucidé par trop de ses successeurs, que l'enfant de Jarnac qualifia non sans lucidité de «comptables». Bien gérer est indispensable, mais construire des politiques de long terme est un devoir qui n'est aujourd'hui plus rempli !

Chapiteau de l'église Saint-Jean-de-Montierneuf à Poitiers.
© kritix.com

Les socialistes français furent trahis par le premier ministre Lionel Jospin qui vendit les intérêts nationaux à la libéralisation économique (Libéralisation du marché de l'énergie à Barcelone, lors du sommet des Chefs d’État et de Gouvernement de l'Union Européenne, les 15 et 16 mars 2002). Cette dérégulation fut adoubée par le ministre de l'économie et désormais grand protecteur de l'ultra libéralisme Dominique Strauss Khan. On dit qu'il a des envies en France... Ce dernier, officiellement prétendu de gauche, trouva par ailleurs en la politique du colonel Khadafi toutes les vertus d'un modèle de développement ! (cf. le rapport du FMI sur la Libye du 15 février 2011 [version .pdf], en anglais, publié 6 jours après les émeutes de Benghazi ; comme le rapporta le bienheureux Canard Enchainé du 9 mars 2011)
       Le républicain Jean Pierre Chevènement contemple avec ironie le bal des hypocrites. Notons que le premier ministre Laurent Fabius dut, ces derniers jours, désavouer les manipulations de la première secrétaire du parti qui n'en finit pas de brader la République à Lille, inspirée par le confessionnel clientélisme hélvético-français de Tariq Ramadan... un frère spirituel surement ! Madame Martine Aubry sait marchander : elle a ce talent.
       Le vieux lion belfortais, lui, ne marchande pas ses valeurs et ne prend le pouvoir que pour agir avec intégrité. Quand le premier ministre Lionel Jospin voulut pervertir sa parole républicaine, il préféra quitter le pouvoir plutôt que de se trahir lui-même. Les hommes d'honneur sont rares, mais ils existent. Sachons les reconnaître. Quant au premier ministre Pierre Beregovoy, son martyr doit nous rappeler combien la vertu républicaine est trop souvent abandonnée aux chiens. Le sage ira toujours déposer celui qui dérobe les souverainetés populaires.

Le gaullisme fut lui aussi abusé par des usurpateurs sarkozystes : ils se firent élire sur ce qu'ils n'étaient pas ! La droite française n'est plus dignement représentée. Elle porte son deuil : celui du chimérique débat contradictoire. Où sont les grandes politiques industrielles qui firent de la patrie une généreuse puissance ? Qui donc vota l'allégeance à l'OTAN ? Quelle est cette façon de ne pas défendre l'exception française : sa langue, ses élites, son peuple ? Honte à toi, premier ministre François Fillon, indigne disciple de feu monsieur le président de la cour des comptes Philippe Seguin ! Marie-France Garaud préfère en rire pour mieux se préserver dans la Providence...

Le masque de fer du bipartisme

Lentement mais surement, la société française perd sa représentativité politique ! Ses élus ne sont plus la juste image des catégories socio-professionnelles de France. Quand la représentation nationale légitime perd la confiance du peuple, alors de souveraineté populaire il n'y a plus. Si le bipartisme se maintient par la force de la corruption institutionnelle, il arrivera ce qui devra arriver : l'implosion sociale. Que les corruptibles se méfient d'eux-mêmes ! La république française en gardera le souvenir.

Il n'est pas de révolution qui tienne, mais plutôt un grondement national. De toutes parts, les symptômes affleurent. Il n'est plus temps d'attendre, mais de proposer au pays un projet politique de long terme. Fédérer toutes les énergies avant qu'elles ne soient incontrôlables. L'attentisme n'est pas de tradition française sur le temps long.

Chapiteau de la collégiale Saint-Pierre à Chauvigny (Poitou-Charentes).
© kritix.com

La classe politique ne permet plus aux personnels charismatiques et intègres sur les valeurs républicaines, d'accéder aux postes clés. Aujourd'hui, un François Mitterrand ne pourrait plus construire l'alternance victorieuse avec un Pierre Mendès France. Les esprits du « tout compétition » sont trop étriqués, pris dans le culte de l'instant, la politique du rien, du jetable. En somme, c'est du bonapartisme contrefait, de la stratégie du chevalier sans tête. Il arrivera que ce temps retombera dans le néant : la nature républicaine reprendra par la force tous ses droits... Cette nature qui a horreur du vide fera que l'ère nouvelle jugera les fossoyeurs de Mémoires.

Un élu qui n'a rien à proposer en dehors du suivisme doit démissionner. S'il cadenasse le pouvoir, il est du devoir citoyen de le dénoncer pour que le peuple puisse décider en toute connaissance de cause. Pour voter librement, il faut être informé sur les intentions idéologiques de toutes les parties. Derrière le marketing politique, puisque c'est de cela dont il s'agit, l'on peut trouver toutes sortes de potentats qui n'ont d'autres préoccupations que la monopolisation des statuts pour mieux détruire le principe de séparation des Pouvoirs. La république française est en danger, menacée par ces dépositaires de cet Ordre qu'ils détruisent.

Voilà pourquoi le peuple de France se détourne, en toute logique, des « légitimistes » de gauche et de droite : faisons que ce drame démocratique soit enseignement d'un retour aux fondamentaux républicains. Que ce vœu soit formé pour une généreuse France-puissance.


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